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La chouannerie à Plumaugat

Le contexte

 

La Révolution française de 1789 a eu un impact tout particulier en Bretagne, notamment en raison de l'attachement très fort d'une grande partie de sa population à ses coutumes et à sa foi catholique. Les nouvelles lois votées par la République naissante bouleversent les habitudes : changement de calendrier, création des postes de maires dans les communes, constitution civile du clergé etc.

Pendant quelques parutions, nous nous efforcerons de retracer ici les événements qui ont marqué la vie des habitants de Plumaugat pendant cette période agitée, où la chouannerie a tenu une place importante. Prêts pour un voyage dans le temps ? C'est parti !

Quelques causes de la Révolution française

La France de 1789 compte 26 millions d'habitants, répartis en trois ordres, ou classes sociales : Noblesse (400 000 personnes), Clergé, (120 000 personnes), le Tiers-État, lui, représente donc 98% de la population.

Les privilèges et les inégalités devant l'impôt sont les principales sources de mécontentement du Tiers-Etat :

  • La Noblesse, qui ne paie que certains petits impôts, dispose de monopoles divers, de droits de péage, de redevances, etc. Surtout elle ne paie pas la Taille. Un impôt qui prélève 53% des revenus.

  • Le Clergé ne paie pas d'impôts, mais prélève un autre impôt, la Dîme, sur les revenus agricoles, dans un pays essentiellement rural.

  • Le Tiers-Etat paie, en plus des autres impôts, la Gabelle (taxe sur le sel), mais les Bretons n'y sont pas assujettis.

 

En 1789, les finances de l’État sont à sec, notamment en raison de l'aide apportée à la guerre d'indépendance américaine. D'autre part, les récoltes de 1788-1789 ont été mauvaises en raison d'orages, puis du gel (jusqu'à moins 18, en Bretagne, l'Ille et la Vilaine sont gelées), donc les prix augmentent, les salaires baissent, la famine est partout présente. Dans la capitale, 10% des Parisiens sont des mendiants...

Quand la situation financière ou politique du pays est mauvaise, le roi convoque les États-Généraux, où les trois ordres présentent leurs griefs et leurs revendications, sans savoir ce que le pouvoir acceptera ou rejettera. Or, Louis XVI est un homme faible, indécis, influençable, qui avoue lui-même ne pas avoir voulu régner.

Enfin, la force armée, dont il est le chef, et dont il pourrait disposer pour réprimer d'éventuelles émeutes, est dirigée par des officiers médiocres et contestés par la troupe.

Les dates clés de la Révolution française

1789

  • 17 juin : Les États généraux, ouverts depuis le 5 mai, se constituent en Assemblée Nationale.

  • 14 juillet : Prise de la Bastille.

  • 4 août 1789 : Abolition des privilèges.

  • 26 août : Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen.

1790

  • 12 Juillet : Vote de la Constitution civile du clergé.

1791

  • 21 juin : Fuite du roi et arrestation à Varennes.

  • 3 septembre : Vote de la Première Constitution française.

1792

  • 10 août : Prise des Tuileries, chute de la royauté.

  • 20 Septembre : Bataille de Valmy et proclamation de la République, le 22.

1793

  • 21 janvier : Exécution de Louis XVI.

  • 3-11 mars : début de l'insurrection généralisée dans l'Ouest, qui s'oppose au recrutement forcé de 300 000 hommes pour aller combattre l'ennemi aux frontières.

  • 5 septembre : Instauration de la Terreur.

1794

  • 27 juillet : Chute de Robespierre.

1795

  • 31 octobre : Mise en place d'un Directoire.

1799

  • 9-10 novembre : Coup d'État du 18-Brumaire an VIII ; Bonaparte est nommé consul provisoire.

1815

  • Cent Jours : derniers soubresauts de la chouannerie.

Tableau d’Auguste Coudert représentant l’ouverture des Etats-Généraux à Versailles le 5 mai 1789.

 

Versailles, musée du château et des Trianons.

Religion et Révolution : à Plumaugat, il ne faut jurer de rien...

La constitution civile du clergé est adoptée par l'Assemblée nationale le 12 juillet 1790. Elle réorganise le clergé séculier et institue une nouvelle Église, l'Église institutionnelle, tout en commençant la déchristianisation.

 

En France, c'est la première expérience de laïcité. Condamnée par le Pape, elle va diviser le clergé français entre clergé constitutionnel (les jureurs) et clergé réfractaire (qui refuse de prêter le serment exigé par les révolutionnaires). La quasi-totalité des évêques et la moitié des prêtres refusent de s'assermenter.

 

En Bretagne, cette réforme passe particulièrement mal auprès de la population, qui soutient les réfractaires et mène la vie dure aux « jureurs ». L'exemple de Pierre Marie Antoine Nouvel, qui accepte de prêter serment, à Plumaugat, est à ce titre édifiant. Elève des Jésuites, à Rennes, plutôt bon dans ses études, on reporte néanmoins sa prêtrise jusqu'en septembre 1758 en raison de « plaintes sur ses mœurs ». Sur recommandation de son oncle, Antoine Elliot, à l'époque recteur de Plumaugat, il finit par obtenir la cure de cette paroisse le 18 juillet 1766. Il a alors 36 ans.

 

Il s'assermente le 20 février 1791, mais cette cérémonie, qui allait de pair avec la célébration de la grand'messe paroissiale, provoqua dans l'église de Plumaugat une violente bousculade qu'il raconte lui-même dans la lettre reproduite ci-dessous, écrite le 24 février et adressée au district de Broons (l’orthographe et la syntaxe de l’original sont respectées).

 

Cliquez pour accéder au texte ->

 

Après s'être rétracté, M. Nouvel mourut à Plumaugat le 29 mars 1792.

 

A noter que les curés constitutionnels, comme Pierre Marie Nouvel, ont également été victimes de ragots et d'accusations concernant leurs relations charnelles, vraies ou fantasmées, avec le beau sexe. C'est ainsi que les archives départementales des côtes d'Armor relatent l'information ouverte sur l'émeute du 20 février 1791 à Plumaugat, le procureur de cette commune instruisant, entre autres, contre une veuve de 55 ans, « femme de labeur », qui, lors de l'esclandre, aurait crié au prêtre assermenté de Plumaugat « qu'il n'avoit pas la pinne si raide comme quand il fut baiser sa servante ». Nous tairons naturellement le patronyme de cette dame, son nom de famille étant honorablement connu dans le bourg de nos jours.

 

Et maintenant, une autre version de l'échauffourée donnée par la commune ->

Vous pouvez ici voir l'influence du vicaire Jean-Joachim Gautier liée à l'échauffourée.

Echauffourée église version municipale.png

Bibliographie

  • La seconde chouannerie dans les Côtes du Nord- Hervé Pommeret.

  • Le pays de Broons pendant le Révolution – Yves Marie Rouat.

  • Mémoires d'un prêtre réfractaire pendant la Terreur – Abbé Guillotin.

  • Des Bretonnes en résistance – Solenn Mabo.

  • Archives départementales des Côtes d'Armor.

  • Histoire générale de la Chouannerie – Anne Bernet.

  • Episodes des guerres de l'Ouest dans les Côtes du Nord
    Pierre Marie Garnier de Kerrigant.

  • Le diocèse de St Brieuc pendant la Révolution – Edmond Biré.

Moyen de faire prêter serment aux évêques et curés aristocrates, en présence des municipalités suivant le décret de l'Assemblée nationale. Estampe, 1791.

Gallica / Bibliothèque nationale de France.

Les tournées clandestines des facteurs de la Chouannerie passaient par Plumaugat

 

Au début de la Révolution française, de nombreux nobles s'exilent en Angleterre, espérant y trouver compassion et soutien moral, mais aussi les aides financières et militaires qui pourraient leur permettre de restaurer la royauté en France. En Bretagne, d'autres nobles ont pris le maquis, recrutant de petites troupes de paysans qui harcèlent les représentants du gouvernement révolutionnaire dans une guerre d'escarmouches.

 

Pour se tenir au courant, pour maintenir le contact de chaque côté de la Manche, pour recevoir nouvelles ou subsides, il faut une organisation. Imaginée par le marquis de la Rouerie, fondateur de l'Association bretonne, naît ainsi un réseau de communication qui serpente à travers la Bretagne, où les courriers porteurs de nouvelles peuvent circuler en toute sécurité, trouvant le gîte et le couvert au fil d'étapes sûres, chez des sympathisants.

Pour connaître la suite, cliquez sur le texte ->

Pourquoi appelait-on les insurgés bretons « Chouans » ?

 

Alors que les contre-révolutionnaires du sud de la Loire sont surnommés « les Vendéens », avec pour devise « Dieu et le roi », ceux du nord de la Loire sont baptisés « Chouans », dont la devise, différente, est « Dieu et mon pays ».

Pourquoi ce nom de Chouans ?

 

L'origine de l’appellation reste incertaine, mais la plupart des historiens considèrent que le nom générique « Chouans » provient du surnom donné à un contrebandier mayennais, fils de sabotier et mauvais garçon notoire, tout comme ses trois frères, du nom de Jean Cottereau, condamné à mort pour des faits de droit commun (il avait notamment été soupçonné d'avoir tué un gabelou mais fut relâché faute de preuves) et contre-révolutionnaire enragé. Ses sœurs n'étaient pas moins virulentes, menaçant « de faire rôtir » les prêtres « jureurs ».

 

La suite se trouve ici ->

 

Portrait imaginaire de Jean Chouan

Source Wikipedia

Révolution et Chouans : l'escalade dans le pays de Broons ?

 

Tout d'abord, le contexte : en 1789, les lois et coutumes particulières de Bretagne sont supprimées par les révolutionnaires. En 1791 se constitue alors, sous l'égide du marquis de la Rouerie, héros de la guerre d'Indépendance américaine, une « Association bretonne », essentiellement composée de nobles, dont l'objectif est de rétablir ces lois et de défendre la monarchie (voir le portrait détaillé du marquis en texte annexe).

 

Mais c'est l'adoption de la constitution civile du clergé et la levée de 300 000 hommes par la Convention pour repousser l'envahisseur austro-prussien aux frontières et les réquisitions qui en découlent, qui mettent le feu aux poudres. S'ajoute à cela, dès le 1er décembre 1790, la suppression des gabelles (impôt sur le sel dont la Bretagne était exemptée) qui plonge dans la misère plusieurs milliers de familles bretonnes qui vivaient de la contrebande de ce condiment.

 

La fin de l'aventure se trouve ici ->

Tuffin de la Rouerie ou les débuts manqués de la chouannerie

Les prémisses de la chouannerie en Bretagne ont commencé avant le déclenchement des premiers combats. Tuffin de la Rouerie, en créant son Association Bretonne, projetait déjà de soulever les campagnes. Pour ce faire, il avait rassemblé autour de lui un certain nobles et de nobliaux désireux de rétablir la royauté. Parmi ceux-ci, mais les historiens ne sont pas tous d'accord sur leur présence dans la conjuration, figureraient aussi Amateur Jerôme de Bois-Hardy (trop jeune selon le chanoine Pommeret) et Pierre Robinaud de Saint-Régent de Lanrelas qui faisait partie de Plumaugat. Au bénéfice du doute, nous dressons quand même un rapide portrait de celui que certains considèrent comme le « père » de la chouannerie bretonne.

L'histoire de ce personnage est relatée ici ->

Dans un article de novembre 2016, le journal Le Peuple Breton racontait l'histoire de Tuffin de la Rouërie de 1751 à 1794, héros mal connu des bretons de la guerre d'indépendance américaine https://lepeuplebreton.bzh/2019/02/01/armand-tuffin-la-rouerie/

Pour les curieux, beaucoup d'informations sont disponibles sur internet au sujet de ce personnage.

Source Wikipedia

1796 : Massacres à Plumaugat

 

Depuis le début de la Révolution, Plumaugat a connu plusieurs épisodes mouvementés, mais en 1796, la guerre fait vraiment son entrée au cœur du village. « Bleus » et Chouans s'affrontent dans un combat sanglant qui laisse, dans chaque camp, de nombreux morts sur le terrain. On brûle, on égorge, on fusille, on assassine sans pitié.

Récits de la journée noire du 21 janvier 1796 ici ->

Gabriel de Freydot du Plantys et son fils Antoine- Marie enterrés à Plumaugat

Episode de la guerre des Chouans par Jules Giradet 

Source

 Musée de Morlaix, Domaine public,  https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=8059881

Saint-Régent

Saint-Régent : le facétieux jusqu’au-boutiste de la chouannerie locale

 

Pierre Robinault de Saint-Régent, dit « Pierrot », fut un chef chouan réputé de la division de Saint-Méen.

De petite noblesse, il naît le 30 septembre 1766 à Saint-Régent, paroisse de Lanrelas, à deux pas de Plumaugat. Originellement, Lanrelas faisait partie de la paroisse de Plumaugat, c'est pourquoi il est toujours considéré, chez nous, comme un enfant du pays.

 

Physiquement parlant, Saint-Régent est de petite taille, très petite taille (1,40 m selon certaines sources), ce qui ne l'empêchera pas d'être un meneur d'hommes apprécié.

 

M. de Kérigant, qui l'a connu, le présente comme « très intelligent, très bien élevé, et l’un des ennemis les plus énergiques de la Révolution ». C'était aussi un aimable farceur, avec le goût prononcé du déguisement.

Vous en saurez plus sur lui ici ->

Dessin anonyme de Saint-Régent

Saint-Régent : l'homme qui faillit tuer Bonaparte

 

Le 24 décembre 1800 à Paris, le Premier Consul, Napoléon Bonaparte, se rend à l'Opéra. Son épouse, Joséphine, est désireuse d'y écouter « La Création » de Joseph Haydn. Précédés (ou non, selon des témoins) d'une petite escorte montée de grenadiers consulaires, deux carrosses se mettent en branle. Le Premier consul occupe le premier, avec Berthier, Lannes et son aide de camp, Lauriston. Le cocher du jour, un dénommé César était, parait-il, légèrement éméché. L’épouse, la belle-fille et la sœur de Bonaparte suivent dans la deuxième voiture.

 

Le cortège emprunte à vive allure la rue Saint-Nicaise, partiellement obstruée par une charrette à cheval et un tas de pierres. Soudain, une énorme explosion retentit, tuant sur le coup entre quatre et quinze personnes en blessant quantité d'autres, et dévastant les maisons avoisinantes.

 

Une fillette de 14 ans, Marianne Peusol, à qui on avait donné 20 sous pour garder la charrette et le cheval, figure parmi les morts : elle a les deux bras arrachés.

 

Le Premier Consul et sa famille, eux, s'en sortent indemnes : l'explosion survient trois secondes après le passage de leur cortège, ce qui leur permet d'échapper miraculeusement à l'attentat. Une opération inspirée par Georges Cadoudal, préparée et exécutée par des Chouans jusqu'au-boutistes : Joseph de Limoëlan, Pierre Robinault de St-Régent, Saint Hilaire, d'Assas et Carbon.

La suite du texte et un extrait de la très très longue audience de son procès sont ici.

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